lundi 31 mars 2008

"Ciel ouvert", les enjeux d'un accord historique

L'accord "ciel ouvert", qui va entrer en vigueur, contient un engagement des deux parties d'ouvrir des négociations en vue de parvenir à un accord dit "de seconde étape". Son objectif est d'ouvrir encore plus ce marché au bénéfice des consommateurs, des compagnies aériennes, des citoyens et des entreprises des deux côtés de l'Atlantique, rappelle Jacques Barrot, vice-président de la Commission européenne chargé des transports.

A partir de minuit, le 30 mars, un nouvel accord aérien "ciel ouvert" entre l'Union européenne et les Etats-Unis d'Amérique entrera en vigueur. Pour la première fois, les compagnies aériennes européennes et américaines auront le droit de voler de part et d'autre de l'Atlantique sans limitations, qu'il s'agisse de la taille des appareils, de la fréquence des services, des destinations ou des prix.


Cet accord est historique par son ampleur, son impact et son niveau d'ambition. Il couvre les vingt-sept Etats membres de l'Union européenne et les Etats-Unis, c'est-à-dire près de 800 millions de personnes. Il poursuit une approche fondamentalement nouvelle en matière de réglementation internationale, en remplaçant la myriade d'accords bilatéraux entre chaque Etat membre et les Etats-Unis, et les restrictions qui les accompagnaient.


L'accord dit des "Bermudes II", signé entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni en 1977, en est peut-être l'illustration la plus connue: seules deux compagnies de chaque pays avaient le droit d'opérer entre Londres-Heathrow et les Etats-Unis. Désormais, l'aéroport de Londres-Heathrow assurera seize nouveaux services quotidiens vers les Etats-Unis, notamment ceux de Continental Airlines et de Delta Air Lines, qui offriront des vols sur cette route pour la première fois.


L'accord "ciel ouvert" va tout d'abord changer la vie des passagers. Les compagnies européennes qui opèrent des vols long-courriers auront désormais la possibilité d'opérer vers les Etats-Unis à partir de n'importe quel point en Europe, et pas uniquement au départ de leur marché national. Air France a déjà prévu de lancer une nouvelle route directe entre Londres-Heathrow et Los Angeles.


British Airways devrait offrir prochainement aux passagers la possibilité de rejoindre New York depuis Paris et Bruxelles avec sa filiale Open Skies. Cette mobilité accrue va pleinement bénéficier aux plus de 50 millions de passagers qui se déplacent entre l'Europe et les Etats-Unis chaque année. Elle va multiplier les facilités pour le flux des marchandises.


N'oublions pas que plus de la moitié du fret circulant chaque année entre l'Europe et les Etats-Unis, d'une valeur de 450 milliards d'euros, se fait par voie aérienne. Pour toutes celles et ceux qui dépendent des vols transatlantiques, le nouvel accord promet plus de concurrence, d'où une amélioration en termes de services et de prix, qu'il s'agisse du segment passagers ou du segment fret.


Le nouvel accord "ciel ouvert" est également une contribution majeure à la mobilité durable. L'industrie du transport aérien est de plus en plus consciente de la nécessité de faire face à ses responsabilités dans la lutte contre le changement climatique, la pollution atmosphérique, les nuisances sonores. L'accord est l'un des premiers à reconnaître l'importance capitale de la préservation de l'environnement.


Les bénéfices de la coopération entre l'Europe et les Etats-Unis dans ce domaine se traduisent déjà dans le projet Aire pour des routes aériennes plus économes en carburant. Ce projet complète l'effort européen de recherche sur une gestion plus efficace du trafic aérien (Sesar), sur les avions propres (Clean Sky), les nouveaux combustibles, ainsi que la bataille menée par l'Europe pour la prise en compte au niveau international du transport aérien dans le système d'échange de droits d'émissions.


Des dispositions similaires de coopération dans le secteur de la concurrence, de la sécurité et de la sûreté aérienne sont également rendues possibles par cet accord. Une concurrence accrue, des dispositions réglementaires mieux alignées et la poursuite de nos projets pour mieux protéger l'environnement: c'est un nouvel envol pour l'aviation transatlantique!


Il reste cependant encore beaucoup à faire. L'accord "ciel ouvert" contient un engagement des deux parties d'ouvrir des négociations en vue de parvenir à un accord dit "de seconde étape". Son objectif est d'ouvrir encore plus ce marché au bénéfice des consommateurs, des compagnies aériennes, des citoyens et des entreprises des deux côtés de l'Atlantique. L'Europe a déjà fait savoir ce qu'elle souhaitait négocier dans cette deuxième étape: la possibilité pour les compagnies européennes et américaines d'opérer à l'intérieur des marchés domestiques, à l'instar de la liberté donnée pour les vols au-dessus de l'Atlantique.


A l'heure actuelle, ce n'est pas possible. Cela est dû en grande partie à l'histoire et à des réflexes protectionnistes d'un autre âge, impensables dans d'autres secteurs de l'économie, a fortiori pour une industrie de pointe. L'Europe a déjà fait tomber ses barrières nationales entre Etats membres au bénéfice de tous les Européens, permettant notamment l'apparition des compagnies low-cost ou de champions mondiaux comme Air France-KLM. Mais nous avons besoin d'une coopération réciproque avec des partenaires internationaux comme les Etats-Unis pour aller de l'avant.


Les consommateurs ne seraient pas les seuls à bénéficier de cet accord renforcé. L'emploi serait également gagnant, si les compagnies européennes et américaines pouvaient offrir des services au-delà de leur marché national respectif. Jusqu'à présent, le système des alliances tente d'offrir aux passagers de meilleures connexions grâce à des groupements entre entreprises distinctes, mais il ne permet pas totalement de faciliter ces déplacements.


La deuxième étape sera donc aussi importante que la première. Plus d'un milliard de passagers voyagent à l'intérieur de l'Europe et des Etats-Unis chaque année. Si nous réussissons à lever définitivement les obstacles à la concurrence pour deux marchés qui représentent ensemble plus de 50 % du trafic aérien international, nous ferons entrer le monde de l'aviation moderne dans une nouvelle ère, au bénéfice de l'Union européenne, des Etats-Unis et de l'amitié qui les lie, du dynamisme économique et de la mobilité durable, valeur fondamentale du siècle à venir.

Jacques Barrot, vice-président de la Commission européenne chargé des transports

(Source: www.latribune.fr)


Aucun commentaire: